Depuis plus d’un an, de fortes tensions ont éclaté entre les partisans de l’opposition politique et le pouvoir de Faure Gnassingbé. La dynastie Gnassingbé est au pouvoir au Togo depuis 1967. Le pays fait face à une crise démocratique qui s’est intensifiée au fil des années, notamment par le fait que les élections soient truquées et que les limites de mandats présidentiels ne soient pas appliquées.
Le contexte historique
Pour comprendre les mouvements de contestations au Togo ces derniers mois, il faut tout d’abord retracer les faits chronologiques qui ont conduit à ces revendications collectives. Eyadema Gnassingbé arrive au pouvoir en 1967, et commence par supprimer le multipartisme en imposant son parti comme parti unique. Suite à de nombreuses émeutes, le multipartisme est finalement réinstauré en 1990. Le régime militaire imposé par Eyadema le maintient au pouvoir et celui-ci demeure Président du Togo en remportant de façon douteuse toutes les élections. En 2002, l’Assemblée modifie la Constitution togolaise afin de permettre à Eyadema de rester au pouvoir, ce qui enraye définitivement les relations entre le pouvoir en place et l’opposition. Eyadema Gnassingbé décède ensuite brutalement d’une crise cardiaque en 2005, laissant le poste de Président vacant. Et alors que la Constitution prévoit des élections anticipées, l’Assemblée, constituée majoritairement des partisans d’Eyadema, nomme Faure Gnassingbé, le fils d’Eyadema, Président du Togo jusqu’à la fin du mandat présidentiel de son père. Comme son père, Faure Gnassingbé remporte ensuite chaque élection présidentielle, chacune entachée de vives accusions de fraude massive. La population se soulève dès les années 2000 pour protester contre ces pratiques anti-démocratiques par des manifestations réprimées dans le sang et la violence, faisant notamment en 2005, après les élections présidentielles, plus de 800 morts, et plongeant le pays dans une crise politique majeure.
La situation aujourd’hui
Cependant, la crise s’est intensifiée en 2017 avec la volonté générale d’un retour à la Constitution de 1992, certes bafouée par Eyadema Gnassingbé à l’époque, mais qui prévoit un seul renouvellement de mandant présidentiel et la réinstauration du scrutin uninominal à deux tours. Faure Gnassingbé se montre réceptif à cette demande, à condition seulement que le renouvellement d’un seul mandat ne soit pas rétroactif, ce qui lui permettrait de se représenter aux prochaines élections pour un nouveau mandat, quand bien même il est au pouvoir depuis 2005. L’opposition se montre très réticente à cette proposition puisque celle-ci demande depuis plusieurs années la démission de Faure Gnassingbé. C’est ainsi qu’une nouvelle vague de revendications commence au Togo. Des manifestations rassemblant des dizaines voire des centaines de milliers de togolais ont ainsi lieu plusieurs fois par semaine, se terminant souvent avec l’intervention de l’armée, l’usage de la violence et de nombreuses arrestations. Les Togolais, prêts au départ à se contenter de réformes constitutionnelles, sont désormais déterminés à destituer leur Président.
Manisfestation dans les rues de Lomé en octobre 2017
Quel futur pour le Togo ?
Après ces nombreux mois de revendications, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) a tenu un sommet politique dernièrement à Lomé et a soumis une nouvelle Constitution à l’Assemblée togolaise, prévoyant le renouvellement d’un seul mandat présidentiel, le rétablissement du scrutin uninominal à deux tours, et l’instauration du vote de la diaspora. Cette Constitution sera votée par les députés le 30 novembre prochain à Lomé. La Cedeao est aussi actuellement en discussions avec le gouvernement pour libérer tous les prisonniers politiques. L’implication de cette instance régionale aboutira-t-elle à la fin des tensions au Togo et à un régime plus démocratique ?
Chloé Bataille, 28/10/18